LeS dOiGtS bLeUs
(Blue Fingers)
"Je toucherai le ciel et j'aurai les doigts bleus"
It's always ourselves we find in the sea
the English version is just below
Bonjour à toutes et à tous, j'espère que ce mois de mars se déroule au mieux pour vous. Dans une semaine et des poussières ce sera le nouvel an iranien (Nowruz) et avec lui les premiers jours du printemps. :-) Nous entrons enfin dans la belle saison et ça se fête !
Ce mois-ci je vous ai choisi 16 poèmes qui vont de Paul Eluard à E.E. Cummings en passant Margaret Atwood et Vincent Voiture. Le cadeau du mois c'est une petite sélection de paroles de chansons de Michel Berger, des paroles de chansons de Cat Stevens et un mp3 spécial pour vous conduire en tapis volant jusqu'au nouvel an iranien : the Magic Carpet Ride !
Dédicace spéciale au Professeur B.B. a.k.a. "La Tramb" et à mon cousin Babak.
Attention, voici le programme des réjouissances :
Poèmes en français (en blanc) :
Le Sylphe de Paul Valéry
Le Balcon de Charles Baudelaire
Stances de Vincent Voiture
Tournesol d'André Breton
Epitaphe de Gérard de Nerval
L'ivrogne et sa femme de Jean de Lafontaine
La terre est bleue de Paul Eluard
La courbe de tes yeux de Paul Eluard
Poèmes en anglais (en bleu) :
The Air is a root de Jean Hans Arp
The Moment de Margaret Atwood
Please Mrs Butler de Allan Ahlberg
To be read in the morning and at night de Bertolt Brecht
If de E.E. Cummings
In time of daffodils de E.E. Cummings
I cannot be known de Paul Eluard
Maggie and Milly and Molly and May de E.E. Cummings
Bonne lecture à toutes et à tous !
Keyvan
webmestre des dOiGts bLeUs
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Hi Everybody !
I hope you're doing good. This month is a very happy one because in a week or so it's gonna be Spring ! It's also gonna be Nowruz (the Iranian new year). So, to celebrate these happy events I've made a selection of 16 poems that I really like. My favourite one is the last one : it's called "Maggie and Milly and Molly and May".
The bonuses are : #1 a selection of Michel Berger song lyrics, #2 Cat Stevens' "Tea for the tillerman" lyrics, #3 a Magic Carpet Ride !!!
And now, here's this month's selection :
Poems in English (in blue) :
The Air is a root by Jean Hans Arp
The Moment by Margaret Atwood
Please Mrs Butler by Allan Ahlberg
To be read in the morning and at night by Bertolt Brecht
If by E.E. Cummings
In time of daffodils by E.E. Cummings
I cannot be known by Paul Eluard
Maggie and Milly and Molly and May by E.E. Cummings
Poems in French (in white) :
Le Sylphe by Paul Valéry
Le Balcon by Charles Baudelaire
Stances by Vincent Voiture
Tournesol by André Breton
Epitaphe by Gérard de Nerval
L'ivrogne et sa femme by Jean de Lafontaine
La terre est bleue by Paul Eluard
La courbe de tes yeux by Paul Eluard
Enjoy the poems and have a beautiful month !
Take Care
Keyvan
webmaster of LeS dOiGtS bLeUs.com
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Le Sylphe
Ni vu ni connu
Je suis le parfum
Vivant et défunt
Dans le vent venu
Ni vu ni connu
Hasard ou génie ?
A peine venu
La tâche est finie
Ni lu ni compris ?
Aux meilleurs esprits
Que d'erreurs promises !
Ni vu ni connu,
Le temps d'un sein nu
Entre deux chemises
Paul Valéry
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The Air is a Root
The air is a root.
The stones are filled with tenderness. bravo.
bravo. the stones are filled with air.
the stones are watery branches.
on the stones replacing the mouth
grows the skeleton of a leaf. bravo.
A stone voice face to face and foot to foot
with a stone glance.
the stones are tormented like flesh
the stones are clouds for their second
nature dances to them on their third nose.
bravo. bravo.
when the stones scratch themselves, nails grow
on the roots. bravo. bravo.
the stones woke to eat the exact
hour
Jean Hans Arp
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Le Balcon
Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses,
O toi, tous mes plaisirs ! ô toi, tous mes devoirs !
Tu te rappelleras la beauté des caresses,
La douceur du foyer et le charme des soirs,
Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses !
Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon,
Et les soirs au balcon, voilés de vapeur rose.
Que ton sein m'étais doux ! que ton cœur m'était bon !
Nous avons dit souvent d'impérissables choses
Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon.
Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées !
Que l'espace est profond ! que le cœur est puissant !
En me penchant vers toi, reine des adorées,
Je croyais respirer le parfum de ton sang.
Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées !
La nuit s'épaississait ainsi qu'une cloison,
Et mes yeux dans le noir devinaient tes prunelles,
Et je buvais ton souffle, ô douceur ! ô poison !
Et tes pieds s'endormaient dans mes mains fraternelles.
La nuit s'épaississait ainsi qu'une cloison.
Je sais l'art d'évoquer les minutes glorieuses,
Et revis mon passé blotti dans tes genoux.
Car à quoi bon chercher tes beautés langoureuses
Ailleurs qu'en ton cher corps et qu'en ton coeur si doux ?
Je sais l'art d'évoquer les minutes heureuses !
Ces serments, ces parfums, ces baisers infinis,
Renaîtront-ils d'un gouffre interdit à nos sondes,
Comme montent au ciel les soleils rajeunis
Après s'être lavés au fond des mers profondes ?
- O serments ! ô parfums ! ô baisers infinis !
Charles Baudelaire
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The Moment
The moment when, after many years
of hard work and a long voyage
you stand in the centre of your room,
house, half-acre, square mile, island, country,
knowing at last how you got there,
and say, I own this,
is the same moment when the trees unloose
their soft arms from around you,
the birds take back their language,
the cliffs fissure and collapse,
the air moves back from you like a wave
and you can't breathe.
No, they whisper. You own nothing.
You were a visitor, time after time
climbing the hill, planting the flag, proclaiming.
We never belonged to you.
You never found us.
It was always the other way round.
Margaret Atwood
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Stances
Je pensais que la destinée
Après tant d'injustes rigueurs,
Vous a justement couronnée
De gloire, d'éclat et d'honneurs,
Mais que vous étiez plus heureuse
Lorsque vous étiez autrefois,
Je ne veux pas dire amoureuse,
La rime le veut toutefois.
Je pensais que le pauvre amour
Qui toujours vous prêta ses charmes
Fut banni loin de votre cour,
Lui, son arc, ses traits et ses armes,
Et ce que je puis espérer
En passant près de vous ma vie,
Si vous pouvez si mal traiter
Un qui vous a si bien servie.
Je pensais, car nous autres poètes
Nous pensons extravagamment,
Ce que dans l'éclat où vous êtes,
Vous feriez, si dans ce moment
Vous avisiez en cette place
Venir le duc de Bouquinken
Et lequel serait en disgrâce,
De lui ou du père Vincent.
Je pensais si le cardinal,
Je dis celui de La Valette,
Voyait le brillant sans égal
Dans lequel maintenant vous êtes,
J'entends celui de la beauté,
Car au prix je n'estime guère,
Cela soit dit sans vous déplaire,
Tout celui de la majesté,
Que tant de charmes et d'appas,
Qui naissent partout sous vos pas
Et vous accompagnent sans cesse,
Le feraient pour vous soupirer,
Et que Madame le Princesse
Aurait beau s'en désespérer.
Je pensais à la plus aimable
Qui fut jamais dessous les cieux,
À l'âme la plus adorable
Que formèrent jamais les dieux,
À la ravissante merveille
De cette taille sans pareille,
À la bouche la plus vermeille,
La plus belle qu'on vit jamais,
À deux pieds gentils et bien faits
Où le temple d'amour se fonde,
À deux incomparables mains
À qui le ciel et les destins
Ont promis le sceptre du monde,
À cent appas, à cent attraits,
À cent mille charmes secrets,
À deux beaux yeux remplis de flamme
Qui rangent tout dessous leurs lois :
Devinez sur cela, Madame,
Et dites à qui je pensais.
Vincent Voiture
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Please Mrs Butler
Please Mrs Butler
This boy Derek Drew
Keeps copying my work, Miss.
What shall I do?
Go and sit in the hall, dear.
Go and sit in the sink.
Take your books on the roof, my lamb.
Do whatever you think.
Please Mrs Butler
This boy Derek Drew
Keeps taking my rubber, Miss.
What shall I do?
Keep it in your hand, dear.
Hide it up your vest.
Swallow it if you like, love.
Do what you think best.
Please Mrs Butler
This boy Derek Drew
Keeps calling me rude names, Miss.
What shall I do?
Lock yourself in the cupboard, dear.
Run away to sea.
Do whatever you can, my flower.
But don't ask me!
Allan Ahlberg
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Tournesol
La voyageuse qui traverse les Halles à la tombée de l'été
Marchait sur la pointe des pieds
Le désespoir roulait au ciel ses grands arums si beaux
Et dans le sac à main il y avait mon rêve ce flacon de sels
Que seule a respiré la marraine de Dieu
Les torpeurs se déployaient comme la buée
Au Chien qui fume
Ou venaient d'entrer le pour et le contre
La jeune femme ne pouvait être vue d'eux que mal et de biais
Avais-je affaire à l'ambassadrice du salpêtre
Ou de la courbe blanche sur fond noir que nous appelons pensée
Les lampions prenaient feu lentement dans les marronniers
La dame sans ombre s'agenouilla sur le Pont-au-Change
Rue Git-le-Coeur les timbres n'étaient plus les mêmes
Les promesses de nuits étaient enfin tenues
Les pigeons voyageurs les baisers de secours
Se joignaient aux seins de la belle inconnue
Dardés sous le crêpe des significations parfaites
Une ferme prospérait en plein Paris
Et ses fenêtres donnaient sur la voie lactée
Mais personne ne l'habitait encore à cause des survenants
Des survenants qu'on sait plus devoués que les revenants
Les uns comme cette femme ont l'air de nager
Et dans l'amour il entre un peu de leur substance
Elle les interiorise
Je ne suis le jouet d'aucune puissance sensorielle
Et pourtant le grillon qui chantait dans les cheveux de cendres
Un soir près de la statue d'Etienne Marcel
M'a jeté un coup d'oeil d'intelligence
André Breton a-t-il dit passe
André Breton
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To Be Read in the Morning and at Night
My love
Has told me
That he needs me.
That's why
I take good care of myself
Watch out where I'm going and
Fear that any drop of rain
Might kill me.
Bertolt Brecht
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Epitaphe
Il a vécu tantôt gai comme un sansonnet,
Tour à tour amoureux insoucieux et tendre,
Tantôt sombre et rêveur comme un triste Clitandre.
Un jour il entendit qu'à sa porte on sonnait.
C'était la Mort! Alors il la pria d'attendre
Qu'il eut posé le point à son dernier sonnet;
Et puis sans s'émouvoir, il s'en alla s'étendre
Au fond du coffre froid où son corps frissonnait.
Il était paresseux, à ce que dit l'histoire,
Il laissait trop sécher l'encre dans l'écritoire.
Il voulait tout savoir mais il n'a rien connu.
Et quand vint le moment où, las de cette vie,
Un soir d'hiver, enfin l'âme lui fut ravie,
Il s'en alla disant : " Pourquoi suis-je venu? "
Gérard de Nerval
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If
If freckles were lovely, and day was night,
And measles were nice and a lie warn't a lie,
Life would be delight,-
But things couldn't go right
For in such a sad plight
I wouldn't be I.
If earth was heaven, and now was hence,
And past was present, and false was true,
There might be some sense
But I'd be in suspense
For on such a pretense
You wouldn't be you.
If fear was plucky, and globes were square,
And dirt was cleanly and tears were glee
Things would seem fair,-
Yet they'd all despair,
For if here was there
We wouldn't be we.
EE Cummings
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L'Ivrogne et sa Femme
Chacun a son défaut où toujours il revient :
Honte ni peur n'y remédie.
Sur ce propos, d'un conte il me souvient :
Je ne dis rien que je n'appuie
De quelque exemple. Un suppôt de Bacchus
Altérait sa santé, son esprit et sa bourse.
Telles gens n'ont pas fait la moitié de leur course
Qu'ils sont au bout de leurs écus.
Un jour que celui-ci plein du jus de la treille,
Avait laissé ses sens au fond d'une bouteille,
Sa femme l'enferma dans un certain tombeau.
Là les vapeurs du vin nouveau
Cuvèrent à loisir. A son réveil il treuve
L'attirail de la mort à l'entour de son corps :
Un luminaire, un drap des morts.
Oh ! dit-il, qu'est ceci ? Ma femme est-elle veuve ?
Là-dessus, son épouse, en habit d'Alecton,
Masquée et de sa voix contrefaisant le ton,
Vient au prétendu mort, approche de sa bière,
Lui présente un chaudeau propre pour Lucifer.
L'Epoux alors ne doute en aucune manière
Qu'il ne soit citoyen d'enfer.
Quelle personne es-tu ? dit-il à ce fantôme.
- La cellerière du royaume
De Satan, reprit-elle ; et je porte à manger
A ceux qu'enclôt la tombe noire.
Le Mari repart sans songer :
Tu ne leur portes point à boire ?
Jean de Lafontaine
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in time of daffodils
in time of daffodils (who know
the goal of living is to grow)
forgetting why,remember how
in time of lilacs who proclaim
the aim of waking is to dream,
remember so (forgetting seem)
in time of roses (who amaze
our now and here with paradise)
forgetting if,remember yes
in time of all sweet things beyond
whatever mind may comprehend,
remember seek (forgetting find)
and in a mystery to be
(when time from time shall set us free)
forgetting me,remember me
EE Cummings
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La terre est bleue
La terre est bleue comme une orange
Jamais une erreur les mots ne mentent pas
Ils ne vous donnent plus à chanter
Au tour des baisers de s'entendre
Les fous et les amours
Elle sa bouche d'alliance
Tous les secrets tous les sourires
Et quels vêtements d'indulgence
À la croire toute nue.
Les guêpes fleurissent vert
L'aube se passe autour du cou
Un collier de fenêtres
Des ailes couvrent les feuilles
Tu as toutes les joies solaires
Tout le soleil sur la terre
Sur les chemins de ta beauté.
Paul Eluard
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I Cannot be Known
I cannot be known
Better than you know me
Your eyes in which we sleep
We together
Have made for my man's gleam
A better fate than for the common nights
Your eyes in which I travel
Have given to signs along the roads
A meaning alien to the earth
In your eyes who reveal to us
Our endless solitude
Are no longer what they thought themselves to be
You cannot be known
Better than I know you.
Paul Eluard
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La courbe de tes yeux
La courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur,
Un rond de danse et de douceur,
Auréole du temps, berceau nocturne et sûr,
Et si je ne sais plus tout ce que j'ai vécu
C'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu.
Feuilles de jour et mousse de rosée,
Roseaux du vent, sourires parfumés,
Ailes couvrant le monde de lumière,
Bateaux chargés du ciel et de la mer,
Chasseurs des bruits et sources de couleurs,
Parfums éclos d'une couvée d'aurores
Qui gît toujours sur la paille des astres,
Comme le jour dépend de l'innocence
Le monde entier dépend de tes yeux purs
Et tout mon sang coule dans leurs regards.
Paul Eluard
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Maggie and Milly and Molly and May
Maggie and Milly and Molly and May
went down to the beach (to play one day)
and Maggie discovered a shell that sang
so sweetly she couldn’t remember her troubles,and
Milly befriended a stranded star
whose rays five languid fingers were;
and Molly was chased by a horrible thing
which raced sideways while blowing bubbles : and
May came home with a smooth round stone
as small as a world and as large as alone.
For whatever we lose (like a you or a me)
it’s always ourselves we find in the sea
EE Cummings
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